Colonia del Sacramento
Une nav pas si tranquille
95 milles en 20 heures pour rejoindre Colonia del Sacramento, la cité antigua ! Mon dernier port Uruguayen avant de traverser le fond du Río de la Plata pour rejoindre Buenos Aires.
Je croise dans des fonds de 3 à 5 mètres, sur une mer opaque couleur chocolat, avec ça et là quelques amas de plantes arrachées aux berges en amont, j’ai l’impression de rouler en bagnole dans les champs ! Je ne suis pas fan de ce Río de la Plata, gigantesque delta où le moindre vent lève des vagues pas très grosses mais bien raides et puissantes, les départs au surf ou au lof se succèdent sans interruption rendant la vie à bord inconfortable avec un bateau cherchant sans cesse son équilibre, balloté tout comme moi, ce n’est ni confortable ni rassurant et cela limite les occupations à bord. De plus il faut réduire plus que le stricte nécessaire pour que le pilote puisse redresser la barre après un départ au lof, ma coque est sale et je me traine, heureusement le courant est porteur, car avec la tendance Sud qui me pousse, les eaux rentrent dans le Río de la Plata. Ici encore, c’est le vent plus que la lune qui dicte les marées.
C’est la troisième fois que je suis pris au filet tel un poisson ! La première fois, c’était de jour avec très peu de vent et j’avais dû plonger dans une eau turquoise pour dégager le filin en acier garni d’hameçons ; la deuxième fois, c’était de nuit sur une zone de hauts fonds, où le vent fraichissant levait de bonnes vagues qui déferlaient, le filet n’était pas signalé par un balisage lumineux, et j’avais dû couper le câble en textile avant qu’il ne m’esquinte trop l’enduit de quille ; cette fois aussi j’ai dû couper, il faisait jour mais le filet n’étais pas signalé par ces genres de perches IOR que les pêcheurs utilisent habituellement, seulement par des bidons flottant à ras l’eau visibles au dernier moment et à condition de faire une veille permanente ! Il faut bien que je dorme et sans pouvoir parler de permanence les tranches de 20 minutes ce n’est pas non plus mon truc, dans les zones tranquilles je préfère prendre une heure et dans ce laps de temps il peut s’en passer des choses, de toute façon même éveillé je jette un regard circulaire dans un timing qui me permet de voir venir une superstructure de bateau mais pas un flotteur caché au creux de la vague…
Depuis Piriápolis, j’ai commencé les démarches de préparation du bateau pour la Patagonie, notamment je dois remplacer le moteur Tohatsu 9.8 CV 2 temps par le même neuf, ici les 2 temps se trouvent très facilement alors qu’en Europe ils sont interdits à la vente pour des raisons écologiques paraît-il. Par chez nous on ne les trouve plus que d’occasion et le mien à au moins 10 ans ! Le moteur tourne comme une horloge mais la structure présente des signes de faiblesse. Sur les conseils de Pierrot, skipper de Gwada, j’envisage de poser une deuxième chaise moteur pour les avoir tout les deux à poste. Un tableau arrière à la Mad Max en perspective : 2 supports d’hydrogénérateur, 2 chaises moteur, 2 arrivées d’essence, la cornière pour la béquille d’échouage et les sorties d’eau, ça va être difficile à tout caser ! Les avantages : plus de puissance disponible pour lutter contre les courants et les vents le temps de se mettre à l’abri où de passer une étroiture, la sérénité de savoir qu’il y a peu de chance qu’ils tombent en panne en même temps, des pièces interchangeables, celles de l’un pouvant servir à l’autre…
En Uruguay le Tohatsu 9.8 CV 2 temps coûte 2080 dollars US payables par CB, en Argentine il est à 2780 dollars US pour des raisons de taxes d’importation à priori. Néanmoins, avec des dollars US changés dans les cuevas en Argentine à 2 fois le taux officiel le moteur payé en pesos argentins me reviendrait à au pire 1600 dollars US ! Bien sur il faut des dollars US, ce que je n’ai pas, mais une autre particularité de l’Uruguay est la possibilité de retirer au distributeur des pesos uruguayens ou des dollars US. Pour limiter le trafic le plafond de retrait par jour est de seulement 200 dollars US, combiné avec le plafond par semaine de ma CB et compte tenu du temps que je compte passer sur place je ne vais pas pouvoir réunir à temps les 1600 dollars US, à moins de relever mes plafonds et mener le siège d’un DAB tel un accro du jeu derrière sa machine à sous ! Bref, vous avez un aperçu des joies qui m’attendent…