De passe en passe
Iles Tuamotu, Polynésie française
du 8/10 au 13/12/2016 plus de 2 mois d’escale
714 Mn dont 9,8 Mn au moteur
8 atolls, 1 île, 20 mouillages
98,6% à la voile
9 passes sur 16 franchies à la voile
A l’école des Tuamotu introduit cet article.
Quelques rappels faisant office de légende :
- Contrairement à toute logique, la marée est haute au lever et au coucher de la lune. Elle est basse au passage de la lune au méridien (supérieur et inférieur).
- PM : pleine mer, BM : basse mer
- « Marées dans le Monde » est un logiciel PC
- « Guestimator » est une feuille de calcul Excel
- Les horaires sont en heure locale (UTC-10), formatés sur 24h
Atoll de Raroia
> Entrée à la voile le 08/10/2016 à 4:40, 10 min après le passage de la lune au méridien inférieur
> Passage de la lune au méridien inférieur vers 4:30
> Etale de BM à 3:51 (« Guestimator »)
> Une entrée facile mais sportive au louvoyage : passe assez large, pas de mascaret, 20-25 Nds de vent, courant sortant faible, les deux établis dans la même direction. Nous sommes proche de l’étale de basse mer, à priori en avance sur elle.
Raroia est notre premier atoll touché après notre départ des îles Marquises, cf. notre article Une navigation contrastée.
Merci Gil et Makalani pour votre chaleureux accueil, le thé et le pain partagés, le cadeau des robes tahitiennes, le cours de Zumba…
> Sortie à la voile le 15/10/2016 à 8:50, 2h15 avant le passage de la lune au méridien inférieur
> Passage de la lune au méridien inférieur vers 11:05
> Etale de BM à 9:24 (« Guestimator »)
> Pleine lune, gros coefficient de 117
> Une sortie rodéo sous voile au vent arrière : marée descendante, le courant sortant qui nous propulse à plus de 9 Nds nous vole un temps notre vent apparent et notre manœuvrabilité. Du coup, le mascaret bien formé et mal évité nous malmène quelques minutes, heureusement vent et courant étaient en phase !
Atoll de Makemo
> Entrée au moteur par la passe Est le 16/10/2016 à 5:00, 40 min avant le coucher de la lune
> Coucher de la lune à 5:38
> PM à 4:28 (SHOM)
> PM à 4:48 (« Marées dans le Monde »)
> Etale de PM à 6:41 (« Guestimator »)
> Pleine lune, gros coefficient de 119, une des trois plus grosses marées de l’année !
> 76 Mn de passe à passe – 20h de navigation
> Vitesse moyenne : 3,8 Nds
> Une entrée difficile en force : appuyés par les deux Tohatsu poussés à fond et deux ris dans la GV, nous remontons péniblement à 3 Nds puis à un peu plus de 4 Nds le long chenal balisé, bordé à tribord par un platier de corail allongé. Il faut tenir la barre fort pour maintenir le cap. A bâbord, 20 Nds de vent à 45° de l’étrave, à tribord, le courant qui court par-dessus le platier nous frappe par le travers, ces forces antagonistes créent un fort clapot qui nous malmène sur l’axe de gîte. Par moment, une survente et une vague complice parviennent à faire sortir de l’eau l’hélice du moteur, celui excentré à bâbord, dans un affreux bruit d’emballement.
Début de marée descendante, gros coefficient, il aurait fallu rentrer plus tôt mais il faisait encore nuit. Etrange, l’horaire d’étale proposé par le « Guestimator » : 1h40 plus tard le courant aurait été à priori plus fort. Si c’était à refaire, nous emprunterions le passage dans 6 mètres d’eau, plus court avec des eaux moins agitées car sous le vent du platier, sans carte de détail, nous nous sommes abstenus.
Dans la dernière ligne droite, occupés par les aussières et les pare-battages – pensant tout d’abord s’amarrer au quai de Pouheva – on a bien failli s’emplafonner l’unique patate de corail du secteur, une grosse frayeur rétrospective et un avertissement sans frais ! Nous jetons l’ancre sous le vent du quai et je plonge cravater une patate de corail (mouillage n°5).
Nous passons 6 jours à profiter de ce sympathique village. Aux coudes à coudes avec le voilier Babar, nous « régatons » les 17 milles qui nous séparent du mouillage n°6, le mieux protégé de l’atoll de Makemo, situé sur son reef NE. Après une charmante soirée passée avec les équipages de Babar, Manta et Keep Cool, nous poursuivons sous voiles le lendemain en direction de la passe NW. Un coup de vent sérieux se prépare et nous avons décidés de l’étaler dans l’angle NW de l’atoll de Tahanea.
Merci :
- Johan et Alix, du voilier Keep Cool, pour le délicieux morceau de thon ;
- Famille de Pouheva pour ta gentillesse, l’avitaillement en eau, le pain de coco et les rouleaux de printemps ;
- Aurélien et Elisabeth pour l’accès à internet dans votre maison de Pouheva, les repas partagés avec les convives, les médicaments gratuits, l’initiative du barbecue sur le reef NE, le « cours » d’Oen (11 ans) pour faire des plateaux avec des feuilles de cocotier tressées, l’essai du youyou…
- Voiliers Babar, Keep Cool et Manta pour vos photos de L’Envol sous voiles.
> Sortie au moteur par la passe NW le 23/10/2016 à 15:30, 3h20 après le coucher de la lune
> Coucher de la lune à 12:08
> PM à 11:00 (pour la passe Est) (SHOM)
> PM à 11:28 (pour la passe Est) (« Marées dans le Monde »)
> Etale de PM à 13:36 (« Guestimator »)
> Une sortie rafting au moteur : marée descendante, 4-5 Nds de courant sortant nous expulse à près de 9 Nds, vent faible par l’arrière dans le sens du courant, pas de mascaret mais des déplacements d’eau impressionnants.
Atoll de Tahanea
> Entrée à la voile par la passe centrale le 24/10/2016 à 6:40, 30 min avant le passage de la lune au méridien supérieur
> Passage de la lune au méridien supérieur vers 7:10
> Etale de BM à 6:27 (« Guestimator »)
> 51 Mn de passe à passe – 15h10 de navigation
> Vitesse moyenne : 3,36 Nds
> Une entrée facile au portant : c’est déjà le début de la marée montante, nous arrivons après l’étale de basse mer et pourtant la lune n’est pas encore à son point culminant ! L’horaire donné par le « Guestimator » semble le plus pertinent. Le vent et le courant établis dans la même direction nous poussent à 6 Nds dans le lagon, il n’y a pas de mascaret.
Une fois la passe franchie, nous longeons pendant 18 milles le reef NE puis Nord de l’atoll afin de trouver protection dans son angle NW (mouillage n°7). En effet, les prochains jours, une dépression passant à notre Sud nous envoie un flux de NW soutenu, nous attendrons qu’il passe ici, à l’abri sous le vent du reef au vent. Nous sommes mouillés à distance du motu car d’une part le platier à fleur d’eau s’avance assez loin et d’autre part l’endroit est truffé de tours de corail qui tutoient d’autant plus près la surface que la profondeur est faible. Je confectionne une bouée sur corail mais notre ligne de mouillage reste en place au cas où le corps mort céderait.
Dans l’immédiat, nous ne sommes que partiellement protégés du vent d’ENE à 15 Nds qui agite un peu le mouillage. Le lendemain le vent faiblit, on en profite pour visiter le motu. Le surlendemain la bascule de vent se produit et le NW s’installe. Le mauvais temps met deux jours à passer, malgré un petit fetch nous sommes bien et l’Envol aussi. Nous profitons de la fin du flux pour rejoindre au portant le mouillage n°8 sur le reef SW, les conditions sont musclées et les 18 milles sont avalés rapidement. Nous ne poursuivons pas plus loin car c’est la dernière et presque unique protection offerte par le reef SW pour cette direction de vent. Nous jetons l’ancre derrière une lune de corail, les vagues parviennent à passer par-dessus, surtout à marée haute, mais le confort est acceptable.
Le lendemain, le vent doit faiblir et effectuer une rotation rapide au Sud en passant par l’Ouest. Nous tentons d’exploiter cette bascule de vent pour rejoindre le reef Est avant que l’alizé ne s’établisse de nouveau et avec lui la nécessité de louvoyer, mais c’est une journée de pétole sans le moindre vent météo, seule l’activité thermique engendrée par les nuages de passage, nous permet de progresser par à coups, nous jetons l’éponge deux milles plus loin après quatre heures de lutte sous un soleil de plomb (mouillage n°9).
Le surlendemain, l’alizé d’Est est dans la place, il nous faudra 23 milles pour achever le tour du lagon, d’abord au louvoyage le long du reef SW, puis au travers le long du reef Est, enfin au portant le long du reef NE, jusqu’à notre mouillage n°10 à proximité de la passe de Otao. C’est un piège car il est soumis au courant de la passe. Nous en faisons la pénible expérience en fin de nuit lorsque le courant s’inverse, le voilà qui rentre dans le lagon contre le vent fraichissant, un clapot court est levé, la ligne de mouillage emmêlée autour des patates de corail s’est raccourcie, dans un brusque rappel de chaîne nous tordons les joues du davier… Au matin nous levons le camp pour mouiller à l’Ouest de la passe centrale (mouillage n°11). Se sera l’occasion de faire dans cette passe notre premier snorkeling dérivant, portés par le flux entrant de la marée montante.
Merci Damien et Cécile, du voilier Colibri, pour le « cours de survie » au motu.
Tahanea est un atoll sauvage et inhabité, idéal pour une retraite tranquille et un bain de nature. Nous y sommes restés dix jours mais certains voiliers y passent jusqu’à deux mois ! A noter un superbe mouillage, dans le Sud du reef Est, par régime d’alizé : GPS 16 57.22 S 144 34.81 W.
> Sortie à la voile par la passe centrale le 02/11/2016 à 16:35, 2h45 après le passage de la lune au méridien supérieur
> Passage de la lune au méridien supérieur vers 13:50
> Etale de BM à 12:34 (« Guestimator »)
> Une sortie sereine au largue : l’observation sur le terrain et le calcul ne coïncident pas, le courant sort, certes faible, environ 1 Nd, mais en pleine marée montante ce n’est pas logique. Peut être est-ce dû au (relatif) petit coefficient de marée en conjonction avec un alizé assez soutenu qui tend à pousser l’eau hors de l’atoll ? Un phénomène d’ensilage pourrait tout expliquer mais le lagon n’y est pas soumis en ce moment…
Atoll de Fakarava
> Entrée au moteur par la passe Sud le 03/11/2016 à 5:20, 2h45 avant le lever de la lune
> Lever de la lune à 8:05
> PM à 5:08 (pour la passe Nord) (SHOM)
> Etale de PM à 6:17 (« Guestimator »)
> 54 Mn de passe à passe – 12h45 de navigation
> Vitesse moyenne : 4,24 Nds, notre jonction la mieux optimisée !
> Une entrée presque réussie à la voile : nous embouquons la passe un peu tard, en fin d’étale de pleine mer, cela nous laisse le temps de faire la moitié sous voile avant de nous heurter à un courant sortant que nous ne pouvons pas étaler dans le dévent de la passe, nous terminons au moteur. Dommage, nous aurions pu raccourcir le bord d’ajustement à la cape pour bénéficier du courant entrant de la fin de marée montante. Etrange, les grosses vagues en entrée de passe, profondes mais aux pentes douces, immobiles comme pétrifiées sur place.
Nous restons deux jours au mouillage de Tetamanu (mouillage n°12). Des bouées sont à disposition gratuitement mais elles sont toutes occupées. Nous jetons l’ancre et je plonge cravater une patate. Nous sommes situés à proximité de la passe Sud, le lendemain nous la rejoignons à pied. Portés par le flux entrant de la marée montante, nous rentrons au bateau dans un grand snorkeling dérivant sur près d’un mille. Fakarava est à la hauteur de sa réputation, les fonds sont magnifiques et les poissons de toutes tailles sont légions !
Dans la manœuvre de dégagement de l’ancre prise sous le corail, réalisée avec dépit au moteur, le support en plastoc de la chaise moteur casse, Carina parvient à maintenir le hors-bord à bout de bras hors de l’eau, nous le ficelons dans le cockpit et poursuivons vers notre mouillage n°13 de Hirifa. Grâce à l’aide providentielle de Marc, un nouveau support de chaise moteur en bois d’atoll est confectionné. Nous sommes heureux de partager des valeurs similaires malgré nos esquifs si différents, lui et Agnès sur Ieta, un catamaran à moteurs de 24 mètres, nous sur L’Envol, un voilier quatre fois plus petit !
Avant que le vent ne tombe complètement, il nous faut remonter à Rotoava au Nord de l’atoll, une trentaine de milles de navigation le long du reef NE tout de même. Vents évanescents et thermiques espiègles se disputeront le privilège de gonfler notre grande bulle rouge de 70 m2 pendant nos presque 9 heures de navigation ! Le portant cède au près sur la fin du parcours, compensant en apparent un vent météo se diluant dans la pétole de cette fin de journée.
La municipalité de Rotoava a installée des bouées de polystyrène blanches devant le village pour les voiliers de passage (mouillage n°14). Une courtoise initiative car les têtes de corail à fleur d’eau sont nombreuses près du rivage et au-delà les fonds plongent vite à plus de 20 mètres. Une petite semaine s’écoule paisiblement. Les vents faibles nous gratifient d’un mouillage confortable, c’est une chance dans ces grands atolls où une bascule de vent est toujours à redouter.
Merci :
- Marc et Agnès, du catamaran Ieta, pour votre accueil à bord, le soutien bricolage, les moments d’amitié partagés ;
- Jeff et Katie, du voilier Mezzaluna, pour vos invitations à manger à bord et sur Emma Louise, le voilier de vos amis, les informations et documents électroniques sur le Pacifique, vos photos de L’Envol sous voiles ;
- Père Augustin pour l’accès à l’eau, aux douches et à la machine à laver de ta paroisse de Rotoava ;
- Camping de Rotoava pour ton wifi.
> Sortie à la voile par la passe Nord le 13/11/2016 à 16:05, 1h15 avant le lever de la lune
> Lever de la lune à 17:20
> PM à 14:51 (SHOM)
> Etale de PM à 14:49 (« Guestimator »)
> Pleine lune, gros coefficient de 117
> Une minutieuse sortie sous voile entre mascaret et swell : le louvoyage dans des vents plus faibles que prévu nous retarde et nous sommes une heure trop tard au rendez-vous, le courant sort déjà plein pot ! Pourtant, un voilier entre encore, tandis que nous nous apprêtons à nous jeter dans le torrent, ou plutôt, au vue de la largeur de la passe, dans le fleuve ! Nous serrons son côté Est laissant à bâbord un violent mascaret avec le gros du courant et à droite le swell et les surfeurs dans les faibles profondeurs, reste un couloir navigable entre les deux que nous empruntons dans un près calculé afin de maximiser le vent apparent et rester manœuvrant. Presque 7 Nds sur le fond et nous voilà dehors en eaux calmes.
Atoll de Aratika
> Entrée au moteur par la passe Est le 14/11/2016 à 16:15, 2h10 avant le lever de la lune
> Lever de la lune à 18:23
> PM à 15:33 (pour la passe Nord de Fakarava) (SHOM)
> PM à 17:07 (PM à la passe Ouest de Rangiroa moins 30 min) (« Marées dans le Monde »)
> Pleine lune, gros coefficient de 112
> 47 Mn de passe à passe – 24h10 de navigation
> Vitesse moyenne : 1,94 Nd, une misère totale !
> Une entrée délicate soumise à de multiples facteurs : après 24 heures de navigation au louvoyage dans des vents faibles (6-7 Nds apparents) où nous avons dû barrer tout du long – à priori le jeu dans les safrans dû à l’usure des rotules perturbe le calculateur du pilote – nous arrivons devant la passe à proximité de la pleine mer. Le courant sort, le vent l’accompagne, ce qui est rare, normalement l’alizé d’Est complique les choses car la houle qui déferle sur le platier peut rendre la passe impraticable. C’est cette configuration météo inhabituelle qui nous a décidés à modifier nos plans et shunter Toau au bénéfice de Aratika, l’atoll oublié des voiliers. En effet, le courant dans cet atoll étant toujours sortant, sauf pendant les marées de vives-eaux, ce vent d’WNW nous soulage du redouté phénomène de vent contre courant. Nous voulions rentrer plus tôt, manifestement la marée est déjà descendante, mais nous sommes soumis aux aléas de la navigation à voiles !
L’approche est ici compliquée par l’absence de repères visuels, les motus qui bordent habituellement la passe sont repoussés à distance par un important platier de corail, invisible à moins d’avoir le nez dessus. Seule une ligne de brisants qui semble continu se démarque sur l’horizon. Dans ces conditions, il est bien difficile de discerner l’entrée de l’atoll ! Grâce à une image satellite de détail, nous avions pris soin de créer avec SAS Planet deux routes, représentant les limites tribord et bâbord de la passe, puis de les importer dans OpenCPN avec un rendu épais et rouge, afin de matérialiser un chenal visible du cockpit et au sein duquel nous devions rester à tout prix !
Nous avons le soleil dans les yeux mais l’absence de mascaret nous décide à entrer. Les moteurs à leurs régimes maxi, nous remontons sans trop de difficulté le courant évalué à 2-3 Nds. La passe étroite (25 m) nécessite un changement de cap à la moitié du trajet et le soleil, en donnant sur l’étrave bâbord, n’est pas trop gênant. La « prédictive », cette flèche en pointillés rouge indiquant la future route du bateau ou COG (Course Over Ground, cad le cap GPS instantané), nous aide pour compenser sans délai le déport du bateau dû à une composante parfois traversière du courant.
A l’intérieur, face au couchant, une course contre la montre avec la nuit s’engage au louvoyage jusqu’au quai du village de Nukumaru, au milieu du reef nord (mouillage n°15). Nous mouillons sous son vent dans les toutes dernières lueurs du jour !
Merci :
- Katerine pour avoir été notre guide, nous confier l’histoire de ta vie, ton invitation chez toi, le repas partagé ;
- Cécile pour tes photos de L’Envol sous voiles.
> Sortie au moteur par la passe Ouest le 16/11/2016 à 15:25, 2h15 après le passage de la lune au méridien inférieur
> Passage de la lune au méridien inférieur vers 13:10
> BM à 11:04 (pour la passe Nord de Fakarava) (SHOM)
> BM à 12:24 (BM à la passe Ouest de Rangiroa moins 30 min) (« Marées dans le Monde »)
> Une sortie musclée sur les freins : l’alizé a repris ses droits brusquement. Mouillés au milieu du reef Nord nous ne sommes plus à l’abri, nous levons le camp précipitamment. C’est en tirant des bords de cape sous trois ris dans un lagon criblé de patates de corail que nous progressons avec une forte dérive vers la passe Ouest. Pas facile de ralentir avec plus de 30 Nds de vent, L’Envol file encore à 1,7 Nd ! A vue de la passe, nous lâchons les freins et démarrons les moteurs, nous sommes à priori en cours de marée montante, cela devrait freiner le flux sortant. Pas de mascaret, 2 Nds de courant nous aide à sortir, la passe est franchie sans difficulté. A l’extérieur, sous le vent du reef, la mer est étrangement calme, elle contraste avec les eaux agitées du lagon.
Atoll de Apataki
> Entrée au moteur par la passe SW (1ère partie) le 17/11/2016 à 5:10, 2h45 après le passage de la lune au méridien supérieur
> Passage de la lune au méridien supérieur vers 2:25
> Etale de BM à 1:46 (« Guestimator »)
> 54 Mn de passe à passe – 13h45 de navigation
> Vitesse moyenne : 3,93 Nds
> Un accès commode au village : après une navigation dans des éléments en furie, vent fort, grosse mer et un pilote contrarié par le comportement lunatique des safrans, nous sommes ravis de renouer avec le calme de la passe SW de Apataki, le contre courant de son côté Sud, rend sa première partie praticable à toute heure en conditions normales. Grâce aux informations de Jeff et Katie, nous savons que le quai du village de Niutahi (mouillage n°16), situé à mi-passe, est accessible pour les tirants d’eaux comme le leur, soit 1,80 mètre, pas de problème pour nos 1,20 mètre.
Joane nous aide à nous amarrer selon les us et coutumes locaux puis nous demande benoîtement pourquoi on navigue dans des conditions pareilles ? Je me le demande aussi, peut être parce que Aratika nous a chassés et que le plus proche refuge était ici… L’Envol pendule nonchalant, les quilles plongées dans un aquarium, quelques rafales revêches ébrouent son mat par intermittence. Nous nous délectons du luxe d’être à quai, sans servitude d’annexe et stress lié au mouillage.
Merci aux habitants de Niutahi :
- Joane pour ton aide pendant l’amarrage du bateau et tes conseils ;
- Juanita pour l’avitaillement en eau avec ton tricycle ;
- Gérante du supermarché pour l’utilisation de ton wifi ;
- Gérard et Miriama pour nous ouvrir votre porte, votre table, nous permettre d’utiliser votre machine à laver et votre wifi, l’information sur Makatea dont celles primordiales de l’existence d’une bouée et d’un lac d’eau douce souterrain…
> Entrée au moteur par la passe SW (2e partie) le 21/11/2016 à 7:00, 1h00 après le passage de la lune au méridien supérieur
> Passage de la lune au méridien supérieur vers 6:00
> Etale de BM à 6:02 (« Guestimator »)
> Une entrée tumultueuse dans le lagon : nous passons à quai quatre jours sereins, bien à l’abri sous le vent du village, à attendre que l’alizé se calme. Cela finit par se produire. Nous décidons d’aller prendre un mouillage d’attente dans l’angle NE de l’atoll. La prévision météo nous gratifie d’une future composante Sud dans l’alizé qui nous facilitera bien la tâche pour rejoindre Ahe situé légèrement à notre Est.
La deuxième partie de la passe est caractérisée par un seuil et une étroiture qui accélèrent les flux. Nous y trouvons 2 Nds de courant entrant pris à rebrousse poil par l’alizé, le long fleuve tranquille de la passe SW de Apataki prend brièvement l’allure d’un rapide. Fétu de paille, nous supportons le joug des éléments naturels. La suite est du même acabit, une lutte au louvoyage contre la mer levée par le fetch de l’atoll, des manœuvres incessantes pour absorber l’énergie des grains qui croisent notre route, une visibilité réduite pour identifier les bouées de fermes perlières et les patates de corail essaimées dans le lagon. GV sous trois ris et trinquette en service, nous sommes encore presque trop toilés pour les pics de vent. Le bateau gîte durement, puis, ces nuages en transhumances rapides nous laissent pantois, sous toilés, en perte de vitesse, esquif exsangue soumis à la dérive. Alors, nous renvoyons le génois en grand, la trinquette est affalée dans son lit, nous relâchons les ris pris dans la GV… Et le cycle à peine bouclé réitère sous des trombes d’eau avec le grain suivant ! Dans ces conditions fluctuantes, nos virements de bord sont moins efficaces car avec l’étai largable étarqué le génois n’a plus la place de passer, nous devons l’enrouler et le dérouler à la volée à chaque changement d’amure.
Enfin, nous touchons le reef Est à Apataki Carenage – une rare possibilité de mettre un bateau au sec dans les Tuamotu et même en Polynésie – et avec lui les vents traversiers. Un relâchement dans les grains nous octroie un de ces trop rares moments, ciments de l’attraction originelle : dans des eaux poli-miroir, touché au débridé par l’alizé, le bateau appuyé sur son bouchain glisse sans contrainte, à portée de tangon, la houle ample se casse les dents sur le corail dans un formidable fracas d’écume qui, jamais, ne pourra nous atteindre.
Un dernier grain nous cueille en arrivant dans l’angle NE de l’atoll, nous collons à la bascule de vent qu’il engendre dans un grand demi-cercle de près serré. Plouf, l’ancre touche le fond après 31 milles parcourus et 8 heures d’effort (mouillage n°17).
> Sortie au moteur par la passe NW le 23/11/2016 à 16:30, 3h20 avant le passage de la lune au méridien inférieur
> Passage de la lune au méridien inférieur vers 19:50
> Etale de BM à 18:37 (« Guestimator »)
> Une sortie express au moteur : l’ancre relevée, nous recalibrons le pilote, deux petits tours et puis s’en vont ! Reconnaissant, il tient les 12 milles et 3 heures de navigation au portant le long du reef Nord jusqu’à la passe NW. Pas de mascaret, L’Envol est happé par le courant de la marée descendante, les bords défilent à près de 9 Nds. Nous n’avons pas le temps d’admirer le paysage que nous sommes déjà dehors.
Atoll de Ahe
> Entrée à la voile le 24/11/2016 à 6:50, 1h25 avant le passage de la lune au méridien supérieur
> Passage de la lune au méridien supérieur vers 8:15
> Etale de BM à 6:57 (« Guestimator »)
> 55 Mn de passe à passe – 14h20 de navigation
> Vitesse moyenne : 3,84 Nds
> Une entrée laborieuse au louvoyage : le vent faiblit en fin de navigation. Nous perdons en vitesse tandis que la lune, bien visible dans le bleu du ciel, monte imperturbablement à son point de culmination, notre rendez-vous avec l’étale. Nous arrivons malgré tout à l’heure. Une demi-heure d’effort sera nécessaire pour remonter les 700 mètres du tapis roulant de la fin de marée descendante. Il n’y a pas de mascaret. Carina à la navigation me guide dans les 100 mètres exploitables de la passe. Son côté NE concentre le gros du courant, il est plus franc et je peux m’en approcher très près mais pas question d’un manque à virer à ce moment crucial. L’eau translucide ne laisse pas d’ambiguïté sur les remontées de fond, elle cadence les virements de bord. Dommage que le pilote ne puisse pas m’épauler, les bords sont courts, il me manque une main pour caller le bateau sur sa nouvelle amure sans abattre inutilement et dans le même temps border rapidement le génois avant que l’écoute ne soit sous tension. Avec Carina à la barre, on n’aurait pas eu besoin de 19 virements, erreur de stratégie !
Dans un long bord de près serré, nous rejoignons la caye du village de Tenukupara dans le Sud de l’atoll (mouillage n°18), nous profiterons une petite semaine de son exceptionnelle protection. Bernard Moitessier a vécu ici trois ans, sur le motu Poro-Poro, son souvenir est toujours vivace, mais nous n’en saurons pas plus car les anciens susceptibles de l’avoir connu ne parlent que le dialecte Tuamotu.
Merci aux habitants de Tenukupara :
- Taane pour ton wifi, tes boissons désaltérantes, tes délicieux biscuits et la coupe de glace ;
- Hiiu pour nous permettre d’utiliser ta machine à laver, l’avitaillement en eau grâce à ton chariot ;
- Pêcheurs pour vos caranges ;
- Jonas pour tes poissons.
Merci Marc et Agnès pour le temps passé ensemble, les discussions captivantes, les explications techniques, les séances de thérapie PBA…
> Sortie à la voile le 30/11/2016 à 6:15, 6 min après le lever de la lune
> Lever de la lune à 6:09
> Etale de PM à 4:33 (« Guestimator »)
> Une sortie aisée au largue : nous avons attendu que l’alizé d’Est prenne une composante Nord afin de garantir un mouillage confortable à Rangiroa, notre prochaine destination. En effet, cet atoll est mal protégé des vents de SE qui en traversant ses 40 milles ne manquent pas de créer un clapot intenable surtout pour un petit bateau comme le notre. Quand nous embouquons la passe, le courant sort raisonnablement, pas de mascaret, vent et courant sont établis dans la même direction.
Atoll de Rangiroa
> Entrée à la voile par la passe Est (Tiputa) le 01/12/2016 à 4:45, 2h15 avant le lever de la lune
> Lever de la lune à 7:01
> PM à 5:10 (pour la passe Ouest) (SHOM)
> PM à 6:38 (pour la passe Ouest) (« Marées dans le Monde »)
> Etale de PM à 5:59 (« Guestimator »)
> 81 Mn de passe à passe – 22h30 de navigation
> Vitesse moyenne : 3,60 Nds
> Une entrée facile au portant : depuis Ahe, la navigation se déroule sans encombre, excepté un gros grain qui nous donne un déluge de pluie et des vents forts pendant deux heures au premier tiers du trajet. Même le pilote, contre toute attente, a fonctionné sans broncher sur l’intégralité du trajet ! J’ai modifié un peu le réglage du gain entre autres choses.
Nous rentrons dans la passe avec la marée montante, 2-3 Nds à faveur, poussés par l’alizé. Les eaux sont calmes et ordonnées. A Rangiroa, une composante Nord dans l’alizé est préférable pour rester protéger par le reef NE de l’atoll, notamment dans la zone la plus usitée entre les passe Est et Ouest. L’orientation des passes de Rangiroa fait que cet alizé rentre par la passe de Tiputa et sort par la passe d’Avatoru, il vaut donc mieux rentrer dans l’atoll par Tiputa et bien sûr avec le courant entrant lui aussi et sortir de l’atoll par Avatoru avec le courant sortant. Nous prenons une des bouées disponibles dans l’Ouest de la passe, c’est le mouillage le mieux protégé de la zone habitée (mouillage n°19).
Merci :
- John et Julia, du voilier Mary Ann II, pour le remorquage de notre annexe jusqu’à « l’Aquarium » ;
- Centre de plongée pour nous ouvrir ton wifi ;
- Voisins de terre pour l’accès à l’eau et les fruits de la passion offerts.
> Sortie à la voile par la passe Ouest (Avatoru) le 06/12/2016 à 10:00, 1h20 avant le lever de la lune
> Lever de la lune à 11:19
> PM à 9:56 (SHOM)
> PM à 11:06 (« Marées dans le Monde »)
> Etale de PM à 10:12 (« Guestimator »)
> Une sortie sous voiles facilitée par un cheminement spécifique : les images satellites nous révèlent une astuce dont la littérature nautique ne parle pas, l’existence d’un étroit chenal naturel en eaux calmes. Nous ne mettons pas le cap sur le village d’Avatoru mais plutôt au Sud du seuil corallien au Sud du village. Le chenal débute ici et longe un delta de corail. Nous sommes proches de l’étale de pleine mer, le courant rentre encore, peut être 1 Nd, le clapot ne pose pas de problème malgré le vent qui le brosse. Le vent par le travers nous emmène lentement mais surement. Dans la passe, nous sommes au grand largue car le vent s’y engouffre lui aussi, notre vent apparent diminue mais nous restons manœuvrant, l’étale nous aide probablement aussi. En tout, il nous faudra une demi-heure pour retrouver l’Océan Pacifique, le cap est mis sur la mystérieuse île de Makatea. Après les Tuamotu avares d’eau douce, son lac souterrain nous attire comme des papillons par la lumière…
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La trace GPS du bateau et nos waypoints d’escales dans les îles Tuamotu sont visibles et téléchargeables gratuitement à partir de cette carte du voyage interactive. Sur un fond d’images satellites, vous pouvez zoomer, vous déplacer et cliquer sur les traces et les escales de L’Envol pour obtenir plus d’information.
Publié le 16/03/2017 grâce au wifi gratuit du Carrefour de la commune de Faa’a, proche ville de Papeete, île de Tahiti, îles de la Société, îles du Vent, Polynésie française, GPS 17 32.81 S 149 35.2 W
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